Luthier de renom, Rémy
Larson réalise depuis plusieurs années des guitares Flamencas,
en étroite collaboration avec le grand musicien Juan Carmona.
Nous l'avons retrouvé lors de la Rue Flamenco, à la Grande Halle
de La Villette, à Paris, alors qu'il exposait quelques
magnifiques guitares de concert. Nous avons été subjugués par la
perfection des courbes, l'originalité des rosaces et le son
extraordinaire qui émanait de ces instruments lorsque les
visiteurs venaient essayer une de ces guitares. Nous avons voulu
en savoir plus sur ce luthier au talent indéniable:
- Rémy Larson, dans quelle
ville se trouve ton atelier et quelle est ta spécialité en tant
que luthier?
- Nous sommes situés dans le sud, entre
Toulon et Marseille dans un petit village qui s'appelle
Le
Beausset. Je
fabrique des guitares classiques et surtout des guitares
Flamencas en collaboration avec Juan Carmona. Nous travaillons
ensemble depuis 5 ans.
- Cette collaboration, comment
est-elle née?
- Nous nous sommes rencontrés à Issoudun, en 2005. Il
faisait un
concert tandis que j'exposais mes guitares. Nous en sommes
restés là. Une année plus tard, c'est lui qui m'a contacté avec
l'idée de créer un modèle de guitare Flamenca avec ses critères.
C'est ainsi que nous avons mis nos compétences en commun pour
réaliser ces guitares.
- Quels sont les critères spécifiques à la fabrication de ces
guitares?
- Il y a des critères de confort de jeu; par exemple, les
manches de guitare doivent être faciles à jouer. Nous avons beaucoup
travaillé sur les épaisseurs, les largeurs, les réglages de
hauteur de cordes, qui sont primordiaux pour le Flamenco. Nous
avons travaill é aussi l'esthétique. Nous avons mis un peu plus
de temps pour cet aspect de notre travail. Nous avons cherché
les rosaces, les chevalets, les bois appropriés. Nous avons
beaucoup travaillé sur le barrage. Juan s'y connait en lutherie.
Son père était menuisier. Il avait donc cette approche du bois.
Il a rencontré beaucoup de luthiers. Nous avons beaucoup
travaillé sur la forme et puis sur les largeurs, les épaisseurs
de barrages, c'est à dire tout ce qui est caché dans guitare,
sous la table d'harmonie. Tout ça s'est mis en place pendant
plusieurs années et maintenant nous avons plusieurs modèles dont
ceux que nous présentons actuellement sur le stand.
- Quel bois utilises-tu pour concevoir les guitares?
- J'utilise différents types de bois. Pour les Blancas, c'est du
cyprès, les tables sont en épicéa, et les fonds et éclisses en
cyprès. Les touches, je les fais toutes en ébène et les manches
en cédro. Les guitares peuvent se décliner avec des mécaniques
ou des chevilles traditionnelles. Il existe aussi un système
intermédiaire: ce sont des chevilles en aluminium, qui ont une
partie fixe dans la tête de la guitare et le reste se règle
comme une mécanique normale. C'est donc très facile à régler,
avec le côté traditionnel.
- Qu'est-ce qui fait la spécificité du bois que
tu utilises et
qu'est-ce que cela change?
- Le bois change la projection et la sonorité de la
guitare. Par exemple, la guitare en cyprès est plus utilisée
pour accompagner les danseurs, les chanteurs. Cela amène
beaucoup de 'réverb' naturel. C'est un son relativement court et
qui a beaucoup de projection. Le cyprès, nous le trouvons dans
le pourtour de la Méditerranée. Il s'agit de guitare Flamenca typique, la
Blanca. La Negra peut être fabriquée par avec un
palissandre des Indes et aussi un palissandre de Rio. C'est un
mélange de bois en provenance d'Inde et du Brésil. Cela donne
des sonorités beaucoup plus riches. Elle s'adresse plutôt à des
solistes comme Juan Carmona, qui ont besoin d'aller chercher des
sonorités parfois dans le jazz, dans le brésilien ou même dans
le
classique aussi. Le répertoire est plus ouvert avec ces
guitares.
- Ta collaboration avec Juan Carmona a-telle changé
ton
regard sur la guitare?
- Oui, totalement; cela m'a poussé dans mes retranchements. Le
monde Flamenco est un monde à part. Pourtant les guitares se
ressemblent. Parfois ont ne fait pas la différence entre une
guitare classique et une flamenca. Depuis que je travaille avec
Juan,
je fais beaucoup plus de guitares Flamencas.
- Ce travail de marqueterie, cette déco,
comment la conçois tu? Fais-tu des recherches?
- Il y a un peu des deux. Il y a des rosaces que je commande car
il y a des spécialistes dans ce domaine et d'autres sur
lesquelles je travaille. On utilise de la marqueterie pour les
parties en bois. Il y a aussi de la nacre. Nous arrivons à
mélanger plusieurs motifs. Cela donne parfois des motifs
orientaux. J'utilise des bois de couleur naturelle et des bois
teintés pour jouer sur les couleurs.
- Ces rosaces changent-elles les sonorités de la guitare?
- Ces motifs sont purement décoratifs. Nous faisons quand
même une entaille dans la table d'harmonie mais cela ne change
pas la sonorité. Ce qui peut changer, c'est le diamètre de la
bouche de la guitare. Plus c'est petit, plus ça donnera une
projection.
- Qui sont
tes acheteurs?
- Il y a des professionnels, des musiciens éclairés
et il y a même
des débutants. C'est une question de pouvoir d'achat aussi.
Quand on joue sur ce genre de guitares, on évolue tout de suite
car elles sont faciles à jouer et les sonorités sont aussi plus
faciles à atteindre. Cela fait progresser tout de suite.
- Quelle est la fourchette de prix
pour l'année 2011 entre les différents types de
guitares que tu fabriques?
- Les Blancas sont à 3300 euros. Elles sont vernies au vernis
cellulosique. Si l'on veut une guitare vernie avec de la gomme
laque ou du vernis au tampon, cela change le prix de la guitare. Pour
les Negras, cela dépend: le palissandre des Indes est à
3500 euros, et le palissandre de Rio est à 5500 euros. Ce sont
les prix de base car ils peuvent varier si, par exemple, je
mets une table qui a 40 ans d'âge.
-
Quelle est la démarche à suivre pour quelqu'un qui veut te
commander une guitare sur mesure?
- Il vient dans l'atelier ou nous nous
rencontrons sur une exposition. Il passe sa commande et je
demande un délai de 4 mois environ pour la fabrication de la
guitare. Sinon, j'ai aussi des guitares en stock dans l'atelier,
cela me permet de vendre et, en parallèle, de continuer à
fa briquer des guitares. Je travaille à domicile dans mon atelier
qui est aussi un showroom.
- Quels sont les autres lieux
en France où l'on peut te rencontrer, prochainement?
- Je serai présent à l' Exposition lutherie à
Mortain, en Normandie, les 11,12 et 13 juin prochains ainsi que
les 1, 2 et 3 juillet à l'Exposition au Festival Jazz à
Montréal.
- Merci Rémy pour cet
entretien et pour ces merveilleuses guitares... à bientôt!
Voir le reportage sur la Rue Flamenco, en mai 2011, à la
Grande Halle de la Villette, Paris:
cliquer ici
Visiter le site web de Rémy Larson:
www.guitares-larson.com
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