Reportage sur le récital d'El
Cabrero , le 15 octobre 2011, à l'I.M.A, Paris.
Texte: Isabelle Jacq 'Gamboena'
Le cante jondo était à l'honneur,
vendredi 15 octobre 2011, dans l'amphithéâtre de l'Institut du Monde Arabe, à
Paris. En effet, dans le cadre de sa tournée pour la sortie de son nouvel album
'Pastor de nubes', le cantaor José Dominguez 'El Cabrero' a offert au
public parisien un récital de cante d'une qualité exceptionnelle.
Le public était au rendez-vous pour ce récital d'El Cabrero, à
Paris. Lorsque ce cantaor est arrivé sur scène, le public a
aussitôt reconnu sa prestance et son élégance. Avec un
chapeau qu'il ne quitte jamais, ses bottes en crocodile et un foulard noué
autour du cou, El Cabrero a fière allure. Le temps semble ne pas avoir
d'emprise sur lui; Cela fait 40 ans qu'il chante et qu'il traverse les
années en restant toujours fidèle à lui-même et au cante jondo. Ce soir
là, il était accompagné par l'excellent guitariste Niño Elias. Lors de ce
récital, El Cabrero a interprété les thèmes de son nouvel album 'Pastor
de nubes' , magnifique album constitué d'un répertoire de palos traditionnels. Il débuta
par une Serrana, en hommage au poète Miguel Hernandez. Le récital
se poursuivit par un cantepor Mariana; puis il chanta por
Solea. Maître incontesté du cante por solea,
El Cabrero interpréta ce palo d'une manière profonde et grave,
puis, il chanta le thème 'Pastor de nubes', un pregon por Zambra,
où l'on remarqua la très belle introduction à la guitare de Niño Elias.
Ce musicien est un guitariste autodidacte. Originaire de Alcalá de Guadaira, dans la province de Séville, il a parcouru le
monde avec les grandes figures du cante comme, par exemple, Miguel
Vargas, Calixto Sanchez et le regretté Chano Lobato. Maitrisant à
merveille l'accompagnement du cante, son mano a mano avec El
Cabrero fut de toute beauté. Puis, El Cabrero interpréta un
Martinete, palo qui s'interprète sans accompagnement
musical. Il chanta en hommage au grand poète Federico Garcia Lorca qui
fut assassiné par la garde civile franquiste, en 1936. El Cabrero
chante plus largement pour les victimes de l'intolérance. Hormis la chanson
'Si se calla el cantor' écrite par Horacio Guarany et celle intitulée
'Tengo el alma desgarrada' dont l'auteur est Marcos Ana, les letras
qu'El Cabrero interprète, il les compose avec sa compagne Elena Bermudez.
El Cabrero est la voix du peuple, de ceux qui souffrent, de ceux à qui on a ôté tout espoir; il sait rappeler à
l'auditoire que la dignité est un des
droits fondamentaux pour tout être humain. El Cabrero n'est pas du
genre à faire des concessions. La vie, il l'a affrontée avec courage, depuis le
jour où il a décidé de devenir cantaor, malgré le refus de ses parents.
Plus tard, la tradition familiale et surtout son gout pour la solitude le
ramènent au métier de chevrier, travail qu'il concilie parfaitement avec sa
carrière de cantaor. Ce soir là, le public fut très ému par son cante,
par sa voix exceptionnelle et sa personnalité atypique. Il honora plusieurs rappels
et termina en interprétant 'Amor mio'. Son cante et le récital
d'en son ensemble fut d'une qualité et d'une force expressive extraordinaires.
Un grand moment plein d'émotions et de jondura!
Interview d'El Cabrero réalisée le 15 octobre 2011, à Paris