
A l'heure où les effets spéciaux, l'accumulation
d'instruments et la surenchère musicale sont de mise, le
guitariste angevin André Charbonneau prouve dans son nouvel
album, que lorsqu'on a du talent, un instrument suffit pour
élaborer une belle œuvre musicale. En effet, dans son
nouvel opus tout simplement intitulé "Flamenco", avec sa guitare pour
seule compagne, André Charbonneau propose
un album épuré et sans fioritures qui emporte l'auditoire
dans l' ambiance colorée, contrastée et chaleureuse de
l'Andalousie! Des mélodies suaves tout en étant résolument
Flamencas, des sonorités portées par un jeu d'une finesse
dont lui seul détient le secret, et le tout qui diffuse le
parfum enivrant de cette Andalousie que nous aimons tant!
Quel travail somptueux! Nous avons voulu en savoir
plus sur cet artiste et sur son nouvel album qui nous ont
véritablement conquis:

- André Charbonneau, après
avoir sorti l’album Iles Canaries, en 2012, tu reviens dans
l’actualité musicale avec ton nouvel album intitulé « Flamenco
». Qu’est-ce qui a motivé l’élaboration de ce nouvel album et
ton retour au Flamenco ?
- En fait, je n’ai jamais quitté le Flamenco. Mon
dernier album date de 2010 juste avant mon disque sur les Iles
Canaries. Assez naturellement, j’alterne
entre un album de Flamenco et un album autre de guitare, mais
toujours avec mes compositions. J’ai deux univers en moi que je
ne peux pas forcement encore aujourd’hui réunir dans un même
album mais j’y travaille…sans y travailler ! Bien entendu, je
joue du Flamenco tous les jours, ça me met en forme ! Ainsi,
pendant que je réalisais mon album de Timple canarien, il y
avait déjà des choses en Flamenco qui se mettaient en place tout
doucement. Et puis de toute manière, je tourne régulièrement
avec mon spectacle « Olé ! » dans lequel je ne joue que du
Flamenco !
- Comment un artiste
originaire de la région angevine et qui y réside, comme c’est
ton cas, a pu rencontrer le Flamenco et en être passionné depuis
de nombreuses années jusqu’au point de continuer à en être
inspiré comme nous le prouve ton nouvel album ?
- Ca a été un véritable coup de foudre ! Mon
premier professeur de guitare, Drew Croon, auquel j’ai rendu
hommage dans mon précédent album de Flamenco, m’a joué un jour
un morceau de guitare flamenca. Cette musique et cette manière
de jouer m’ont complètement bouleversé !
J’ai soudain ressenti le Flamenco comme le langage le plus
approprié pour la guitare, comme né avec la guitare ! J’ai
ensuite entendu en Andalousie nombre de merveilleux guitaristes
souvent en soliste et c’est d’ailleurs là qu’est née cette envie
du solo et du disque en soliste auquel je tiens particulièrement
! Depuis, après toutes ces nombreuses années passées là-bas à
l’apprendre et à m’en imprégner, le Flamenco fait partie de moi
et me quitte jamais ! On a sa culture d’origine mais on peut
avoir aussi une culture d’adoption et pour moi, c’est le
Flamenco. Si l’on travaille, elle nous le rend, elle nous donne
quelque cho se
en échange. Aujourd’hui, je suis quotidiennement nourri par le
Flamenco.
- Revenons à ton album qui est
une évocation de
l’Andalousie, comme nous le constatons déjà dans le choix des
titres des morceaux. Qu’est ce qui a motivé cette thématique ?
- Je sortais d’un album en
hommage aux Iles Canaries. J’avais choisi comme angle les lieux
emblématiques et les légendes des Iles. J’ai énormément lu et me
suis beaucoup documenté sur le sujet. Cela a d’ailleurs été
passionnant ! Quand j‘ai abordé ce nouvel album, j’ai eu l’idée
de faire un peu la même chose pour changer de mon approche
habituelle du Flamenco ! Dans le passé, j’allais très souvent en
Andalousie. J’y ai rencontré beaucoup d’artistes et j’ai
vraiment vécu plein de choses merveilleuses là-bas ! Mais pour
cette occasion, j’ai aimé lire et me laisser aller à rêver cette
Andalousie là !
- C’est un album très coloré.
Il y a des ambiances, des saveurs, c’est très imagé. Nous
reconnaissons vraiment chaque ville à laquelle tu te réfères.
Comment as-tu fait pour extraire, dans ta musique, cette
justesse d’évocation pour chacune de ces villes ?
- Au départ, influencé par ce que l’on entend
tous actuellement, j’ai composé des morceaux un peu dans l’air
du temps. Mais je me suis très vite rendu compte que cela ne me
correspondait pas du tout. J’ai compris qu’il fallait que j’ai
le courage de dire non à tout cela pour me permettre d’offrir
autre chose, pour être le plus proche possible de moi. J’ai donc
parcouru à nouveaux mes nombreux livres sur l’Andalousie, j’ai
vu des films, des photos…Et j’ai commencé à tout visualiser
musicalement. Des airs sont venus, des thèmes
qui décrivaient des paysages ou qui racontaient des histoires.
J’ai dû aussi parallèlement lâcher prise par rapport à ce qu’on
attend et même ce qu’on exige aujourd’hui d’un guitariste de
flamenco pour pouvoir tranquillement m’épanouir et créer mon
univers et j’avoue que je suis assez fier de cette posture
sereine ! M’est venue ensuite l’idée de choisir certaines villes
comme titres et quel plaisir immense ça a été de faire se
rencontrer mes airs avec ces villes et leurs légendes. Ce sont
évidemment des noms de villes qui font rêver ! Et puis ça se
partage très facilement avec tous car l’Andalousie fait rêver
tout le monde ! Et je tiens énormément à ce partage. C’est une
de mes raisons d’être et de jouer de la musique !
- Comment as-tu fait pour
relever le défi d’offrir une diversité musicale dans un album
solo, c’est-à-dire avec ta guitare pour seule compagne ?
-Tu te rends compte, en Andalousie, je prenais
des cours particuliers avec Vicente Amigo qui vivait alors
encore chez ses parents ! Il sortait déjà musicalement
complètement du lot ! J’ai étudié aussi avec Manuel De Palma qui
accompagnait El Pele, Paco Serrano qui m’a beaucoup appris de
l’accompagnement de la danse, José Antonio Rodriguez, déjà en
pleine recherche harmonique ! Et d’autres encore ! C’était
merveilleux ! Quand j’arrivais chez eux ou dans les peñas ou
dans les patios, je les entendais jouer de la guitare toujours
en soliste. Je trouvais cela sensationnel de les entendre ainsi
tout dire avec cette seule guitare !
J’ai appris beaucoup de tous ces grands
guitaristes mais surtout j’ai retenu que le plus important
n’était pas de les copier mais de me mettre au travail comme eux
pour chercher mon « toque » à moi ! C’est ce qu’on attendait de
toi à l’époque et ça c’est très flamenco !

J’aime ce rapport étroit avec ma guitare, sorte
d’introspection musicale ! Je prends beaucoup de plaisir à jouer
cette guitare flamenco qui frise, qui craque ! Ce jeu un peu
rude date d’un autre temps. C’est ce côté archaïque qui me
fascine.
Sans calcul, j’ai développé naturellement, par
gout, mes mélodies presque exclusivement dans les médiums et
dans les graves. Les aigus, je les utilise surtout pour marquer
le rythme que j’adore. Je me ressens un peu comme un sculpteur
mais avec de la matière musicale. Je crois avoir développé
pendant toutes ces années une manière de jouer qui m’appartient
et qui est un peu différente, malgré tout, de ce qui se fait
actuellement. C’est ma manière à moi de jouer ce Flamenco que je
respecte et cela prouve que l’on peut se l’approprier et se
sentir libre. C’est ce qui fait aussi que c’est une grande
musique !
Du coup, le choix de l’instrument est très
important dans ma démarche. J’ai besoin d’une guitare vraiment
typée, au timbre très colorée, en cyprès et ultra légère. Un
instrument de là-bas, qui me donne tout de suite sur le plan
sonore une identité très forte pouvant mettre en valeur mes
compositions. La guitare devient le prolongement de mon corps,
je ne fais plus qu’un avec elle et c’est parti pour des heures
de musique !
- Parcourons chaque thème de
ton album pour mieux en connaitre le contenu…
- Je ne souhaitais pas associer systématiquement
le palo qui correspond à la ville. « Ronda » est le premier
thème. J’ai composé un refrain original sur un rythme de
Buleria. Il évoque cette ville pittoresque , perchée sur une
falaise, une ville d’aventure avec ses bandoleros. Pour «
Sevilla », j’ai choisi cette fois-ci d’associer le palo !
C’est quasi incontournable ! J’avais en plus depuis longtemps
envie de composer des sevillanas et dans ce contexte imagé, je
me sentais libre et heureux de le faire ! J’ai eu à cœur
qu’elles soient agréables pour la danse ! Pour « Jaen », ville
un peu plus discrète, j’ai raconté une belle histoire sans souci
de palo précis mais je l’ai jouée de manière très
flamenca ! Pour « Cadiz », j’ai repris à mon compte le Tanguillo
typique et traditionnel évoquant le Carnaval et la fête et j’ai
changé un peu les harmonies pour le personnaliser et lui donner
une autre humeur ! Pour « Huelva », j’ai composé une Buleria
très mélodique uniquement en arpèges pour célébrer le fameux
départ vers les Amériques. Pour « Granada » imposante avec son
Alhambra, son Sacromonte, j’ai créé une autre Buleria très
sonore et festive ! Pour « Almeria », j’ai composé une sorte de
Taranto très hiératique dédié à cette province où l’on a tourné
tant de films hollywoodiens qui nous ont fait rêver, là encore !
Pour « Cordoba » qui est ma ville de cœur, j’ai flâné tout
doucement autour du palo de l’Alegria en préférant des
harmonies légèrement dissonantes. « Malaga » est le dernier
thème et c’est une rumba ! Je l’ai voulu chantante, évidente !
Elle déclenche immédiatement le sourire, les palmas et fait
bouger les gens.
- On ressent beaucoup de
douceur et de délicatesse dans ta musique. C’est un album très
agréable à écouter. Dans quelle mouvance aspires-tu à te
positionner : dans un Flamenco contemporain, un Flamenco
traditionnel ou un style personnel issu de ton expérience et de
ton histoire personnelle ?
- C’est la troisième proposition. Le Flamenco
traditionnel, je l’adore car il est vrai ! Le Flamenco moderne
me séduit plus qu’il ne me touche. Ses virtuoses
m’impressionnent un peu comme tous ces effets spéciaux au cinéma
dans les films à la mode ! Mais moi, je préfère voir un bon
Woody Allen ! J’ai passé l’âge des effets spéciaux et j’avoue
que toute cette virtuosité souvent mise en avant ne m’intéresse
plus trop ! Ce que tu dis à propos de mes mélodies et de
ma manière de jouer me touche beaucoup car c’est vrai que je
cherche autre chose. L’intérêt c’est qu’on fasse tous du
Flamenco mais de façon différente, chacun avec son histoire et
son talent ! Et que tout ça cohabite ! C’est tellement agréable
de se rencontrer entre compositeurs guitaristes et de pouvoir
échanger sur nos créations respectives !
- Dans ton actualité
artistique, tu proposes aussi un spectacle nommé « Olé ». Quels
sont les thèmes que tu abordes et que présentes-tu au public
dans ce spectacle?
- Je suis venu par étape à ce spectacle qui je
pense est un peu unique en son genre. J’ai commencé
en passeur, avec beaucoup de pédagogie par une prestation
intitulée « André Charbonneau joue et raconte le Flamenco » puis
ça a évolué très vite de par ma personnalité vers autre chose !
Comme j’ai en plus un passé de marionnettiste et de magicien,
j’ai souhaité retrouver d’anciennes sensations de scène en
dehors du simple jeu de guitariste ! Je me suis mis à écrire un
nouveau spectacle sous la forme d’un « show » ou je parle autant
que je joue ! En fait je cherche à cultiver les gens sur la
chose andalouse tout en les amusant. Comme dit le comédien
Michel Bouquet : « N’oubliez pas que le public ne vient pas
pour vous voir jouer mais pour jouer avec vous ! ». Je raconte
des anecdotes, je leur fais clamer le fameux «Olé » lequel
ponctue un spectacle qui se déroule sous forme de sketches. Il y
a des moments musicaux où je prête des instruments aux gens, des
moments magiques avec de la prestidigitation, de l’humour. Le
public démarre au quart de tour ! On peut
passer d’un morceau de guitare très profond comme une
Seguiriya à un sketch complètement débridé où les gens fo nt
les clowns sur scène ! Et le fait d’alterner les genres fait que
le public est très à l’écoute des moments de guitare. Souvent,
je réunis à la fois les enfants, les parents, les grands parents
sur scène ! C’est plein de vie comme dans les fêtes andalouses !
- Ton album va-t-il sortir
bientôt? et dans quels pays ?
- Il sort le 13 mai. On le trouvera aux Etats
Unis, au Japon, à Taiwan, à Hong Kong, au Canada et dans
plusieurs pays d’Europe.
- Est-ce qu’on peut l’acheter
sur internet aussi ?
- Oui, il sera en téléchargement sur toutes les
plateformes. Alain Normand est un très bon producteur qui
connait bien son métier. Il est de la vieille école ! Il a
plusieurs Labels : Sunset-France, Playasound et Air Mail Music.
Il me suit depuis mes débuts et je l’en remercie ! C’est lui
aussi qui a choisi la photo qui est sur la pochette. Il m’a fait
découvrir l’importance d’avoir une pochette attractive pour
rencontrer d’autres publics ! C’est un peu à l’image de mon
spectacle « Olé ! » finalement.
- Quelles sont tes prochaines
dates de tournée?
- Je me produis en concert le 19 mai prochain au
Centre Culturel Brassens à Avrillé (49) pour fêter la sortie de
mon album. Quant au spectacle « Olé ! », je le jouerai le 4 juin
prochain à 17h30 pour le Festival en Jardins de Lailly en Val
(45) près de Beaugency.
- Merci André pour ce moment que tu nous accordé.
Toutes nos félicitations pour ton travail et pour ce nouvel
album qui va surement rencontrer un véritable succès !
- Merci à toi Isabelle pour
ton écoute si précieuse dans ce monde du Flamenco dont tu
élargis les frontières !

Biographie et la discographie
d'André Charbonneau: Cliquer ici
Contact artistique d'André
Charbonneau:
Tel: 02 41 34 59 43
Email:
andrecharbonneau.ole@gmail.com
|