Musique Alhambra

L'Actualité du Flamenco

 

  

 

 

El Lebrijano                          

Pour Juan Pena "El Lebrijano", le Flamenco  est une oeuvre musicale qui englobe et réunit deux cultures qui coexistaient dans l'ancien Al-Andalus. Après trente ans de carrière, il nous offre aujourd'hui un travail très attendu, "Casablanca", oeuvre dont la musique est jouée par l'Orchestre Arabo-Andalou de Hassan II. Depuis 1989, El Lebrijano n'entrait plus dans les studios. Il y est retourné pour "Tierra", une vision gitane de la Découverte de l'Amérique. Les raisons paraissent claires pour celui de Lebrija. "Moi, j'ai déjà 33 disques sur le marché. Sortir un autre disque sans raison ne m'intéresse pas. Si je ne trouve pas une raison, une justification, je ne le sors pas. J'ai travaillé pendant longtemps avant d'obtenir "Casablanca", qui a d'ailleurs beaucoup de connotations importantes du fait de l'avoir travaillé consciencieusement." En 1983, il avait déjà collaboré avec l'Orchestre marocain de Tanger et Paco Cepero sur le disque "Encuentros", le mélange des musiques n'est donc pas une nouveauté pour lui. Il est clair que Juan Pena est fasciné par l'atmosphère arabe et sa musique : "Cela fait déjà 11 ans que je travaille, que je vis avec eux, que je vais les voir dans leurs villages... Je suis amoureux de la musique arabe pour beaucoup de raisons; elle comporte beaucoup de connotations musicales similaires aux nôtres, celles de l'Andalousie, pour la simple raison que nous avons été sous leur domination pendant 800 ans. Je pense que tout Andalou est amoureux de la musique arabe."Casablanca" est plus qu'un disque. On ressent quelque chose de très spirituel qui enveloppe tout : les images, la musique ...il se crée une atmosphère qui semble refléter l'intérieur de cet artiste. "C'est un état d'âme, un état d'esprit, un état d'émotion, quand le disque commence, on découvre la situation : "je suis comme les gens qui vinrent sur ma terre, je suis le sang maure et ami du soleil, ils gagnèrent tout, ils perdirent tout..."Cette partie "j'ai l'âme au parfum arabo-espagnol", je l'adore, elle me permet de m'identifier complètement. C'est une situation agréable, que je ne peux définir mais que j'explique dans cette phrase, c'est fait avec la musique et non avec les mots, et c'est dans la pensée. Il y a également le message final, que les hommes s'entendent comme je m'entends musicalement avec ces peuples. Plus qu'un conseil, c'est un message d'espoir et de compréhension qui m'est venu à un moment et que j'ai mis par écrit." Au niveau technique, ce disque comprend, en plus des collaborations musicales précédemment citées, d'autres collaborations d'un luxe authentique qui ont influencé le résultat final de ... "On m'a laissé une liberté totale pour faire ce disque, j'ai choisi mes producteurs, Jesús Bola et Diego Carrasco. Nous avons travaillé 6 mois pendant lesquels nous avons vécu des expériences fortes et incroyables. Je crois que si j'avais travaillé avec d'autres, "Casablanca" aurait été différent. Il s'est crée un esprit de fraternité, d'effort et de liberté... il y a eu beaucoup de difficultés, beaucoup de voyages. Nous avons travaillé 8 heures par jour pendant 6 mois, et parfois on restait en studio 14 ou 15 heures. Mais il y avait des jours où l'on décidait de ne pas enregistrer et il n'y avait aucun problème." Il est certain que El Lebrijano fait des disques qui portent en eux quelque chose en plus, et dans lesquels il reflète des idées, des sentiments différents, et ce pas seulement dans "Casablanca" mais aussi dans "Tierra" ou dans "La palabra de Dios a un gitano". Il nous explique sa vision du flamenco : "Je ne sais pas pourquoi mais quand on fait du flamenco, on ne peut pas avoir de concept d'œuvre ni chanter en faisant des cercles, mais seulement avec des chansons libres sans aucun parallélisme, sans aucun objectif à suivre ou manière de se rencontrer. Dans ce pays, personne ne l'a jamais fait comme ça. Moi, depuis 1971 et "La palabra de Dios...", je le conçois ainsi, comme quelque chose ayant un sens, une oeuvre musicale." Il est curieux que, dans un monde aussi fermé que celui du flamenco, il y ait des artistes qui pensent comme El Lebrijano, qui soient partisans de l'innovation du panorama actuel et de l'ouverture à d'autres musiques : "Nous portons en nous le métissage arabe depuis très longtemps, pour des raisons ethniques. Quant au "nuevo flamenco", c'est une fusion de bonnes musiques qui s'unissent pour donner quelque chose de beau. Je n'exclue pas de le faire un jour si je le peux, on ne sait jamais." Juan Pena a commencé à chanter et à jouer de la guitare très jeune. Depuis ses 17 ans, il n'a pas arrêté de gagner des concours, comme par exemple celui de Mairena del Alcor, et a collaboré avec des artistes de taille comme Gades ou La Paquera de Jerez. Il tire de tout cela un bilan positif : "Je crois que j'ai beaucoup appris avec les années, en effet quand un disque est lancé avec succès dans le monde entier, il y a une raison. Je suis très content de ce disque, je crois avoir fait une musique importante, profonde, joyeuse, qui ne mène pas à la petitesse du marché, c'est différent de tout. Je crois qu'il va y avoir un avant et un après ce disque, étant donné que nous entrons dans une nouvelle époque, le XXI ème siècle." Juan Pena "El Lebrijano" nous laisse sur cette idée encourageante et ouverte qui, espérons-le, deviendra une réalité, tout comme ses souhaits de fraternité et d'union des peuples. "Casablanca" peut être un bon début, musical tout au moins.  Maru Iglesias ( Revista flamenca Tablao)
 

 Discographie:

"El Lebrijano"

el Lebrijano avec Paco de Lucia (1970)

"Persecusion" (1976)

"Casablanca" 1997

"En directo"(1997)

 

"Encuentros" 1998

"Lágrimas de cera"(1999)

"Sueños en el aire" (2001)