- Kanélé, le spectacle que tu as présenté dans le cadre
du festival 'Ascension Flamenca' de Banyuls/Mer, a obtenu un véritable succès.
L'idée de participer à ce Festival, comment est-elle venue?
- Il y a un certain temps, je suis parti en Allemagne avec
Pedro Soler pour faire un concert de
cante et, à notre retour, il
m'a proposé de faire ce concert sous la forme d'un cuadro
Flamenco traditionnel. Cela fait deux ans que le Festival
Flamenco de Banyuls/Mer existe et c'était
l'occasion justement de faire du Flamenco parce que nous adorons cela
et cela nous fait beaucoup de bien de faire du traditionnel. Du
fait que
nous avons enregistré un album flamenco fusion dans lequel nous mélangeons
plusieurs styles, revenir au traditionnel, c'est toujours très
agréable.
- Les musiciens qui constituent
ton cuadro Flamenco sont-ils les mêmes que ceux avec lesquels tu
as enregistré ton nouvel album?
- Oui, ce sont les mêmes musiciens et nous venons tous de la
tradition du Flamenco. En ce qui me concerne, j'ai toujours
acc ompagné le baile et comme j'écrivais de plus en plus, j'avais besoin de m'exprimer au
travers d'autre chose. Les textes m'ont amené à écrire la
musique d'une autre manière.
- Tu viens de Perpignan. Comment s'est déroulée ta formation
dans ta ville natale?
- Au départ, j'ai travaillé avec toutes les danseuses qu'il y
avait à Perpignan. J'ai commencé très jeune dans le chant, en
cantaor pa tras; c'est vrai que cela m'a toujours intéressé
d'accompagner la danse. Je suis d'origine andalouse. Ma
grand-mère est gitane andalouse. Elle est venue à Perpignan et
s'est mariée à un gitan catalan d'ici. Je me suis formé à
Perpignan. A la maison, j'entendais un peu chanter et vers 17
ans, on est venu me chercher. On m'a proposé d'accompagner la
danse et je me suis mis à accompagner la danse.
- Quelqu'un chantait ou dansait dans ta famille?
- Ma mère chantait. Artistiquement, je trouvais cela super, mais
elle n'en a pas fait son métier.
- Qu'est-ce qui t'a donné envie de te lancer
professionnellement?
- On est venu me chercher pour l'accompagnement de la danse et
je me suis pris au jeu.
- Tu sors ton troisième album. Peux-tu nous expliquer les étapes
de ta carrière artistique auxquelles chaque album correspond?
- Le premier album a été enregistré en 1999 'Desde Francia'. C'est
une carte postale du moment enregistré très vite. Le deuxième
album est un travail sur le poète Federico Garcia Lorca. Il s'appelle 'Gitano en Nueva
York'. Dans cet album, l'écriture prend déjà une part
prépondérante. J'ai mélangé mes textes à ceux de Lorca. Je
compose aussi avec mes musiciens. J'écris un peu les paroles et
les mélodies. Sur le dernier album, j'ai
pratiquement tout écrit. J'ai fait aussi une reprise de la
chanson 'Je suis malade' de Serge Lama. Je l'ai réécrit en
essayant de respecter le côté Flamenco. Dans ce nouvel album, il
y a une idée que je voulais affirmer, celle de ma mixité
culturelle. Il y a un morceau que
j'ai intitulé 'Andalunia'. Cela représente la confrontation
entre espagnol et catalan, ce qui est de bonne guerre avec
Barcelone et Madrid. Andalunia est représenté par un personnage
que j'ai inventé. C'est un minotaure entre le taureau et l'âne car
nous sommes en catalogne, région où l'emblème est l'âne et pour
l'Espagne, l'emblème c'est le taureau. J'ai mélangé ces deux identités et j'ai crée
une république qui s'appelle Andalunia, entre la Catalogne et
l'Andalousie, pour abonder dans les mélanges. L'album 'Entre dos mundos',
c'est tout cela. Pour certains, la rumba a une
connotation péjorative. Pour moi, la rumba fait partie
intégrante de ma vie, et je considère qu'une rumba bien faite
peut avoir beaucoup de présence. Je n'avais pas envie de séparer
tous ces styles. C'est un album de musique et ceux qui veulent y
trouver du Flamenco, ils le trouveront aussi. Cet album est un
album Flamenco, mais non traditionnel. Il y a par exemple un bolero très cubain. J'ai écrit un texte pour le mettre en
bolero.
Il y a beaucoup d'ambiances, d'atmosphères et d'influences. Je
n'avais pas envie de mettre des barrières. Par ce fait, les
morceaux Flamencos ressortaient encore plus. Il y a un martinete,
fandango, une alegria.
- En fait, tu crées ta propre
identité an travers cette fusion...
- Oui...le public qui vient nous voir sait que Kanélé peut faire de
la rumba, de la solea, un martinete. C'est une histoire
d'ouverture, de sincérité. Quand nous faisons les choses avec
sincérité , les gens le ressentent.
- Tes références dans le Flamenco?
- C'est Jerez: El Torta, au chant, el Morao à la
guitare, Tio Borrico et d'autres...
- Composes-tu la musique et les textes dans ce nouvel album?
- Oui, pratiquement tout hormis la reprise dans
laquel j'ai adapté
les paroles; Il y a aussi une chanson de Manuel Serra qui
s'appelle 'Mediterranea', chanson que j'adore et que je trouve
bien dans l'esprit de la méditerranée, sur un rythme de
buleria. J'ai écrit toutes les paroles des autres thèmes et
j'ai composé les musiques.
- Quels sont les artistes qui t'accompagnent?
- Il y a Olivier Morlan, à la guitare, François Miniconi aux
percussions, Philippe Elias à la guitare électrique, et
Floriane, mon épouse, à la danse.
- Comment as-tu choisi les musiciens qui t'accompagnent?
- Nous travaillons ensemble depuis une dizaine
d'années. Nous nous sommes rencontrés en accompagnant dans les
ateliers. Nous avons commencé à faire des choses ensemble.
François, le percussionniste, nous a rejoint il y a 6 ans.
-Avez vous montés d'autres
spectacles ensemble?
- Oui, l'année dernière, nous avons monté un
spectacle qui se nomme 'Señorita Isabel' dans lequel nous nous
inspirons de la vie d'Elisabeth
Eidenbenz, une jeune infirmière autrichienne qui, sous
l'égide de la Croix Rouge Suisse, mit en place une maternité
pour les réfugiées espagnoles et qui accueillit aussi des mères juives,
tsiganes ou celles fuyant la barbarie nazie, pendant la guerre.
- Merci Kanélé pour ce moment
passé avec toi et à très bientôt.
- Merci à toi aussi...
Visiter le site web de Kanélé:
www.kanele.net
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