Musique Alhambra

L'Actualité du Flamenco

 

  

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Interview de Michel Albertini réalisée par Isabelle Jacq  en juin 2007

 pour Musique Alhambra

 

 

_ Ce soir, à Planète Andalucia, nous avons assisté à un spectacle magnifique mêlant la poésie Hispanique à  la musique Flamenca. Michel Albertini, quelle est l'origine de ce spectacle auquel tu participes et dont tu es le metteur en scène ?

- C'est un projet relativement ancien. J'avais rencontré il y a quelques années un danseur de tango et de Flamenco, Dario Arboleda, un danseur extraordinaire. Je prenais des cours avec lui. Il se produisait régulièrement à Vienne, en Colombie, et quand il passait par  Paris à Planète Andalucia. Pour son anniversaire, il avait organisé un spectacle a la Sainte Chapelle,  quelques uns de ses amis  étaient venus pour participer à la fête. Moi ce soir là j’ai dit un texte de Lorca. Dario est mort d'une crise cardiaque quelques mois plus tard et nous avons fait une soirée ici, à Planète Andalucia, en souvenir de lui. Au cours de cette soirée, j'ai dit un texte qui, cette fois, était accompagné par Dimitri Puyalte à la guitare; Jean Paul Ferrand qui était présent dans la salle, séduit par l’expérience , m'a proposé de faire d'un spectacle avec Dimitri. Il avait pressenti la fusion.  C’est un homme assez clairvoyant.  C’est aussi lui qui a eu l’idée de me faire interpréter les coplas.  Nous avons  concrétisé ce projet. Cela a donné lieu à un premier spectacle de poésie et musique que nous avons joué à Planète Andalucia puis à Lille dans le cadre d'un Festival et enfin en Espagne, à Sanlucar de Barrameda, lors du Festival International de Flamenco. D'autres dates se sont enchaînées; Ce n’est pas évident de faire des spectacles 'poétiques', la poésie cela effraye un peu les gens... le public craint de s'ennuyer, ce qui n'est pas le cas dans la réalité. Non, c’est plutôt l’inverse. Enfin, je crois…

- Le public a adoré ce spectacle et les réactions des gens étaient très positives. Michel, pour toi, l'objectif de ce spectacle, quel est-il  ?

- Le projet de ce spectacle est de donner au public qui vient ce qu'il vient chercher ; l'émotion, la sensualité et parfois la colère. On peut lier ces trois éléments;  ils peuvent parfaitement s'unir et former la sauce délicieuse d'un plat extraordinaire dont la viande serait les mots. La poésie, c’est carnivore. On mange  la chair des mots et on la recrache. Et puis, il y a la guitare de Dimitri. C’est un musicien de très haut niveau.

- ...Effectivement, c'est ce que l'on ressent dans le spectacle.  Pourrais-tu nous parler de ta rencontre avec le Flamenco?

-Ma rencontre avec le Flamenco s'est produite dans mon enfance.  A cette époque, sous Franco,  la part communiste de ma famille, mes oncles, mes tantes, passait ses vacances en Espagne, parce que la vie y était moins chère. Nous partions en caravane de 2CV et nous allions camper sur la Costa Brava. A Vinaroz. Nous passions là des mois extraordinaires à pécher des oursins et à boire du vin blanc, à jouer à la pétanque, et moi, à embrasser les filles de mon âge. Le samedi soir, ils m’emmenaient de temps en temps à Barcelone, dans les cabarets à touristes, pour  écouter et regarder des spectacles de Flamenco. Cela me bouleversait.  Je trouvais les femmes divines, les robes extraordinaires et les chants me faisaient pleurer. Plus tard, alors que je tournais un film au Maroc, j'ai rencontré Jean-Paul Ferrand, l’actuel gérant de Planète Andalucia. A cette période de sa vie, il élevait des chevaux dans les haras du roi. Nous sommes devenus amis, puis nous nous sommes perdus de vue et nous nous sommes retrouvés, par hasard, 17 ans après, ici, à Planète Andalucia. Tout d'un coup j'ai repensé à mon enfance, à toutes ces années passées en Espagne, au fait que mes premières émotions artistiques provenaient de là…

- C'est donc un hommage au Flamenco que tu fais au travers de ce spectacle... n'est-ce pas?

- Il y a plusieurs fils que je tire de la même pelote ; Sous Franco, j'étais acteur en France, et déjà militant.  Je suis parti en Espagne avec Lluis Llach  et un ami acteur Catalan, José Maria Flotats. Pour donner un coup de main. Lluis était  interdit à Barcelone, il chantait dans les villages alentours, moi, pendant qu’il chantait je passais dans les rangs avec un sac de pomme de terre, les gens y jetaient des pesetas qu’on amenait aux ouvriers en grève. J'ai été chassé d'Espagne juste avant la mort du Caudillo. J'y suis revenu quelques années après. Les temps avaient heureusement changé. Mais j’ai retrouvé cette part très forte de révolte donc de révolution que j’aimais tant  dans l’art du Flamenco, Cette révolte là a été écrite par des grands auteurs espagnols comme Alberti, Leon Felipe et Miguel Hernandez, Antonio Machado,  et j'ai voulu essayer de relier tout cela. Crier des choses encore et toujours importantes ;  l'amour du peuple, la générosité, la fraternité, ce besoin de parole échangée.

 

- Y -a-t-il une suite de ce projet, vas- tu créer un autre spectacle sur ce principe?

- Ce spectacle, nous allons l'accroitre. Nous souhaitons aussi y incorporer du chant

- Il y avait le grand chanteur andalou Antonio Jurado « El Nono »dans le spectacle que tu as présenté au public, à  Sanlucar de Barrameda, l’année dernière... n'est ce pas?

- Oui, je regrette qu'il n'y ait pas eu de chanteur cette fois ci. Je voudrais donc réinsuffler du chant et travailler aussi un éclairage particulier. L'importance de la lumière est capitale. Il y a quelque chose à trouver,  à créer.  Nous allons travailler là dessus: textes, guitare, chant et lumières...

- Merci beaucoup Michel pour le temps que tu nous a accordé pour cet entretien... nous serons ravis aussi de découvrir la nouvelle version de ce spectacle... A très bientôt!

 

 

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